Mardi 13 juillet 2021
La question de l’égalité au sein du partenariat entre l’UE et l’Afrique était le sujet d’un récent événement organisé par des OSC portugaises à l’occasion de sa présidence de l’Union européenne (UE). En toile de fond de tout le débat, comme un décor de théâtre,  était nettement perçu un désir de passage du paradigme technocratique à une véritable fraternité humaine.

Le nœud du problème était de savoir si le partenariat concerne les institutions gouvernementales et leur intérêt commun ou leurs peuples et le bien commun. Se concentrer sur l’intérêt commun et le paradigme technocratique a tendance à exclure le sens de la responsabilité envers les plus faibles de la société et le bien commun.

Le secrétaire d’État portugais aux affaires européennes et à la société (Portugal), Francisco André, a été très clair dans sa prise de position. Il a estimé que le partenariat était passé du paternalisme à un partenariat entre égaux.  Cette position a provoqué l’ire des participants africains car elle différait radicalement de l’expérience africaine du partenariat.  L’idée d’égalité dans le partenariat est probablement née des similitudes morphologiques entre l’UE et l’UA. Toutefois, cette comparaison n’est qu’un écran de fumée qui dissimule la colossale asymétrie des pouvoirs institutionnels entre les deux unions continentales, qui est la principale raison de l’impact non transformateur du partenariat sur le continent africain.

L’égalité souhaitée dans le partenariat entre l’Afrique et l’UE n’est pas une mesure quantitative d’organisations structurelles similaires des deux côtés, mais une mesure qualitative de la capacité institutionnelle de l’Afrique à naviguer à travers les défis du bi- et multilatéralisme pour des résultats plus justes pour ses peuples. En effet, le soi-disant partenariat d’égal à égal, dans son état actuel, est un vrai rébus  et ne peut être considéré que comme une vision, un beau rêve. Néanmoins, il reste à voir comment cette belle histoire de parité pourrait éventuellement devenir un véritable partenariat entre égaux.

En revanche, Tanya Cox, directrice de Concord Europe, s’est démarquée. Elle était à fond en diapason avec l’expérience des participants africains. Elle a souligné que l’écoute était un chaînon manquant dans le partenariat Afrique/UE, l’empêchant d’être transformateur et innovant pour l’Afrique. Elle soulignait notamment que le partenariat ne concerne pas l’UE et les institutions dysfonctionnelles de l’UA, mais les peuples d’Afrique et l’UE. Ce n’est que dans une atmosphère d’écoute que les deux voisins peuvent comprendre ce qu’est le partenariat pour leurs peuples, qu’ils sont dépendants l’un de l’autre et que les deux régions ont quelque chose à offrir au-delà des soi-disant aides.

En effet, l’écoute est une activité très stimulante qui va au-delà de la capacité à saisir la logique des mots. Il s’agit de l’art d’entendre les gémissements et les besoins humains sous les mots chaotiques et incohérents d’une relation humaine déséquilibrée. Lorsque Tonya Cox a souligné la prééminence de l’écoute dans le partenariat Afrique-UE, elle a, par inadvertance, abordé ce qui est fondamental dans toute collaboration humaine réussie. Malheureusement, les positions que nous voulons défendre et les privilèges dont nous jouissons nous empêchent souvent d’être à l’écoute dans les affaires humaines. L’appel de Tanya Cox à l’UE pour qu’elle se mette à l’écoute dans son partenariat avec l’Afrique est une voie vers un partenariat plus transformateur qui ne doit pas rester lettre morte.

AFEJN appuie la position de Cox et affirme qu’en explorant ce mode d’écoute, l’UE doit être très attentive au conflit entre ses valeurs et son intérêt économique en Afrique. L’UE doit laisser tomber les avantages d’un partenariat malheureux à court terme pour un partenariat à long terme, plus transformateur et durable. Ce changement exige l’honnêteté, l’équilibre des pouvoirs, l’instauration de la confiance et l’humilité de consulter l’Afrique pour co-créer un agenda plus significatif et transformateur pour le partenariat. Le sommet n’est que la célébration d’un processus. Les parties prenantes cherchent à voir comment le processus engage les jeunes, les femmes et les communautés locales, car le partenariat les concerne et non les sociétés transnationales (STN). La question pertinente est de savoir si l’UE est à l’écoute des personnes sur lesquelles les résultats du processus auront un impact. Dans ce mécanisme les personnes concernées ont-elles eu droit à la parole. Leur a-t-on réservé un siège dans la chambre des débats en vue de mener les choses à bien ?
Chika Onyejiuwa
AEFJN