Comboni, en ce jour

Comboni doit faire face en mission aux graves conséquences de la famine.
A la Société de Colonia, 1866
Priez l’éternel Bon Pasteur afin que toutes les brebis égarées et tous les infidèles se retrouvent à l’ombre de l’arbre de vie et que de toutes les nations de la terre soit fait bientôt un seul bercail avec un seul Pasteur.

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N° Ecrit
Destinataire
Signe (*)
Provenance
Date
1091
Père Giuseppe Sembianti
0
El-Obeid
16. 07. 1881

N° 1091; (1045) - AU PERE GIUSEPPE SEMBIANTI

ACR, A, c. 15/128

Vive Jésus, Marie et Josepeh !

N° 29

El-Obeïd, le 16 juillet 1881

Mon cher Père,

[6855]

La teinture "Perigozzo" est un excellent médicament pour le Soudan, apprécié par tous les Missionnaires et par les Sœurs comme remède pour de nombreuses maladies, les fièvres, les purges, etc.

Plus que tous les autres c'est l'Abbé Luigi Bonomi qui l'apprécie davantage, et il m'a prié, dans une note que j'ai reçue alors que j'étais chez les Nouba, de lui en envoyer depuis Khartoum.

En Afrique Centrale (on ne pense pas à ces sacrifices ou à cent autres, ni en Europe, ni à Rome, et par ignorance on juge l'Afrique Centrale à l'échelle de toutes les autres Missions; mais nous sommes supérieurs à ces bagatelles, nous travaillons et nous souffrons pour l'amour de Dieu et pour les âmes et nous allons de l'avant ), comme le dit souvent Sœur Grigolini, chaque année, durant neuf mois, on souffre de faiblesses, d'épuisement, d'accablement, etc.

A cause de tout cela nous avons du mal à travailler, on souffre aussi d'inappétence, on dort très peu (et moi, je peux le dire, car je passe dix mois de l'année dans cet état, mais je suis fort et courageux, et je vais de l'avant).

En revanche, la malheureuse Virginie souffrait moins, et elle travaillait comme quatre, et nos Sœurs de Vérone qui sont ici le savent.

Or la teinture "Perigozzo" prise dans cet état fait beaucoup de bien, mais elle est bonne aussi pour prévenir les fièvres, etc.


[6856]

Dans votre lettre N° 25, vous me dites que vous m'avez écrit à propos du mode d'emploi pour la teinture, suggéré par Monsieur Zamboni, et vous me l'avez écrit dans la lettre du 29 janvier 1881. J'ai repris la lettre du 29 dans laquelle vous me parlez de ce mode d'emploi, mais je ne le trouve pas. Peut-être était-il écrit sur une feuille en annexe que j'aurai oubliée à Khartoum où j'ai reçu votre lettre du 29 janvier ? Le fait est que je ne l'ai pas ici, et je ne sais pas de quoi il s'agit.

Pourriez-vous demander à M. Zamboni (je vous prie de le saluer de ma part) de réécrire son mode d'emploi et de me l'envoyer ?

La teinture est un remède très efficace contre le choléra, et j'en ai lu toutes les preuves ; la cure fonctionne très bien, mais il n'y a pas de choléra en Afrique Centrale. Ici on meurt davantage, mais pour d'autres raisons.

J'ai écrit à l'Abbé Losi pour qu'il rédige un rapport sur tous les bons effets de la teinture "Perigozzo", parce qu'il est le plus compétent et je vous l'enverrai.

Moi aussi je rédigerai un rapport sur la base de mon expérience et du témoignage de tous les nôtres.


[6857]

Je n'ai jamais bercé Alberto de vaines promesse, en lui disant que je l'ordonnerais Prêtre, ni au Caire, ni jamais; il dit que oui. Moi je jure que non. (Isidoro de son côté ne rêve même pas d'être Prêtre, car il arrive à peine à faire le catéchiste; c'est Alberto qui a dit à tout le monde et à moi-même qu'Isidoro voulait devenir Prêtre, et nous l'avons tous cru, mais il n'a rien dit et il ne dit rien à ce propos, il fait le sacristain, il répare quelques montres, mais il n'étudie jamais).

A Vérone (nemo propheta in Patria sua ) on croira Alberto, et on ne me croira pas, moi, comme le pense l'Abbé Bortolo. Comme dans les autres affaires, on croit plus aux paysans qu'aux Missionnaires... (je ne parle pas de vous) ; mais je m'en fiche si je suis tombé si bas dans la considération des gens; nous irons au Paradis, car celui qui sert Dieu dans le monde doit souffrir et être humilié.


[6858]

Alberto ne m'a jamais demandé à devenir Prêtre, ni au Caire, ni lors du voyage. C'est à Khartoum, après que j'avais donné les Ordres Mineurs à Francesco (pour assister à l'ordination, Alberto avait revêtu l'habit de clerc avec d'autres jeunes Africains), qu'il m'a demandé, puisque il avait revêtu l'habit de clerc, si je lui permettais de le garder. Quand il m'a posé cette question, quatre ou cinq des nôtres étaient présents et ils m'ont dit : "oui, permettez-lui de le garder". J'ai répondu : "oui". Alberto n'avait jamais fait de travaux manuels, ou des travaux attachés à un séculier, comme tout le monde les faisait, surtout à El-Obeïd, où Prêtres et Laïcs ont construit l'église en travaillant comme aides maçons (l'Abbé Bertoni, alité en 1851, m'a raconté que le regretté Père Marani, avait aussi travaillé comme ouvrier, comme maçon, qu'il portait les pierres, etc. lors de la construction du couvent des Stigmates en 1816), et les Abbés Fraccaro, Luigi, et Vincenzo font tous les travaux.


[6859]

Eh bien, en voyant Alberto qui ne faisait absolument rien, qui avait besoin lors des voyages que d'autres ou l'Abbé Luigi lui étalent la natte à chaque arrêt, qui n'allait pas chercher du bois, etc., mais qui était toujours seul avec un livre à la main, l'Abbé Luigi surtout, l'Abbé Fraccaro mais les autres aussi m'ont demandé :

"Qui est cet Alberto qui ne veut rien faire ?" J'ai alors appelé Alberto, et en présence de l'Abbé Giuseppe et des autres, je l'ai exhorté à faire ce que font tous les autres, etc. Il m'a répondu sèchement : "Si ce n'était pas pour vous, qui êtes un vrai père, je ne serais pas venu au Soudan. Je suis scandalisé par tout le monde, par les Sœurs au Caire, qui veulent que je travaille ; mais moi je ne ferai jamais rien, sauf ce que doit faire un Prêtre, et seulement étudier". Je lui ai alors fait remarquer que tous les Prêtres aussi travaillent en Afrique, et qu'à fortiori il devait travailler car il avait fait le serment de venir comme laïc catéchiste. "Non - m'a-t-il dit - je veux être Prêtre, sinon je pars tout de suite, et j'irai à Rome à Propaganda Fide, où le Recteur a promis de me recevoir comme candidat à la prêtrise,... et vous aussi, vous me l'avez promis". "Non - lui ai-je répondu - je ne te l'ai jamais promis ; à Vérone, je t'aurais laissé rentrer chez toi, si tu n'avais pas juré d'être Missionnaire laïque". "Non - a-t-il répondu - vous me l'avez promis ; vous l'avez aussi promis à Francesco, et vous avez maintenu votre promesse, et vous avez nommé Dichtl pour son instruction. Pourquoi ne me donnez-vous pas un enseignant? Peut-être que je suis moins bien que Francesco ?" "Non - ai-je répondu - je ne vois pas comment tu peux être Prêtre, car les capacités et la vocation te font défaut". "Non - a-t-il répondu - j'ai plus de capacités que Francesco, et j'ai une véritable vocation, et si vous ne me donnez pas tout de suite un enseignant pour étudier, je pars immédiatement pour Rome, et j'irai voir le Recteur du Collège de Propaganda Fide, qui me fera devenir Prêtre, etc."


[6860]

Quelques jours se sont écoulés (tous l'ont pris pour ce qu'il était).

Au mépris du règlement de l'établissement, sans demander la permission à personne, il sortait tous les jours, et il restait pendant des heures avec deux protestants de Prusse [...]. Sœur Grigolini m'a dit de prendre soin d'Alberto, parce qu'elle ne le comprend pas... A ce point là, je l'ai fait venir dans la cour des Sœurs, où je me trouvais, et en présence de Sœur Grigolini, je lui ai parlé en vrai père, et Sœur Teresa en a été stupéfaite. Mais il ne m'a répondu que ceci : " Je veux être Prêtre ou bien je pars de suite ".

Le soir, une heure après l'Ave Maria, je l'ai appelé pour le calmer, et je lui ai dit de rester tranquille, d'obéir en tout au Supérieur, que Saint François d'Assise n'était pas Prêtre non plus, et qu'il a été un grand saint, etc. Il m'a alors dit : "Monseigneur, donnez-moi tout de suite un Prêtre pour qu'il m'enseigne le latin et la théologie et vous devez me déclarer par écrit quand vous m'ordonnerez Prêtre. Je ne ferai rien qui ne soit spécifique à un Prêtre, je ne travaillerai pas, je ne toucherai à rien... mais j'étudierai, et mon maître doit m'instruire plusieurs heures par jour, etc.".


[6861]

Plusieurs Missionnaires ont entendu notre discussion, et ils riaient...

"Eh bien - ai-je dit - même si tu avais la sagesse de Salomon et l'instruction de Saint Thomas d'Aquin, avec ces sentiments, jamais je ne t'ordonnerais Prêtre".

Alors, il a dit : "Donnez-moi l'argent nécessaire pour partir demain pour Rome".

"Puisque je n'ai pas d'argent, même pas un centime pour partir maintenant, etc. ". Les autres lui ont dit d'attendre mon retour à Khartoum, car il partirait avec moi. "Non - a-t-il répondu - je pars immédiatement, et je trouverai moi-même l'argent". Il prit deux malles... et deux jours après, il partit avec un négociant.

On sait qu'il a trouvé de l'argent auprès des commerçants. J'ai ordonné à Khartoum et au Caire (suivant les conseils et l'avis de tous nos Missionnaires) de ne pas le recevoir à la Mission, et de ne pas lui donner d'argent, car en présence des autres, et avec leur accord, je lui ai déclaré : "Du moment que, de ta propre volonté, tu quittes ici l'Institut, tu n'appartiens plus à l'Œuvre ; je te considère désormais comme renvoyé de l'Institut, et tu n'as droit ni au logement, ni au voyage".

"Peu importe - a-t-il répondu - Dieu sera avec moi ". Il avait déjà reçu 20 thalers, et le chameau avait été payé par les Prussiens. Mais à Khartoum il y avait l'Abbé Bortolo, et il l'a accueilli. Après, je ne sais plus rien. Qu'Alberto s'en aille, et qu'il dise... peu importe.


[6862]

Dieu protège l'Œuvre. Vous n'êtes pour rien dans le cas d'Alberto. Il sait bien que je l'aurais renvoyé de Vérone, s'il n'avait pas fait le serment en tant que laïque catéchiste. La norme à suivre est celle que vous avez toujours proposée, j'en suis convaincu, bien que parfois, étant au pied du mur, j'aie agi différemment, devant Dieu, j'en suis justifié.

Vous avez raison quand vous dites que les candidats, hommes et femmes, Prêtres ou Laïcs doivent toujours être bien éprouvés auparavant ; c'est la raison d'exister et une raison de la plus grande importance, des Instituts de Vérone.

Les œuvres ne s'améliorent pas en un instant.

Malheur aux Sœurs du Caire si je n'avais pas reçu à Vienne l'angélique novice Anna qui, comme me l'a écrit Faustina, a été le soutien et l'appui des malades. Mais ce sont de rares exceptions que la nécessité peut justifier. En général, les candidats doivent être mis à l'épreuve sans réserve, de la meilleure façon possible, et le plus longtemps possible à Vérone. Nous nous sommes compris.


[6863]

Ce que vous avez fait pour protester contre le Comte Dalbovo, qui a toujours été fou, suffit largement. Je le connais depuis 1855, quand pour mes services en tant que Prêtre, médecin et infirmier à l'occasion de l'épidémie de choléra, Son Excellence De Jordis, le Délégué de Vérone, outre la farine de maïs qu'il avait alors offerte à l'Abbé Mazza, m'avait écrit officiellement une lettre d'éloges pour les services rendus à Buttapiestra, parce que j'avais guéri presque tous les malades atteints du choléra; dans la lettre il m'écrivait que toutes mes requêtes seraient toujours exaucées, en toute circonstance, car elles sont accompagnées des larmes de douleur de l'humanité, etc.

Le Délégué de Vérone, le 2 octobre 1855, a remis ce document au Comte Dalbovo, le Maire de Buttapiestra, et ce fou ne me l'a donné qu'en février 1856, et ouvert. A cause de cet abus il a été démis de ses fonctions de Maire.

Je connais toutes les folies et les erreurs de ce Comte, et il ne mérite pas d'autre réponse car, en dernière analyse il est détraqué et cela est connu à Vérone.

Je suis très content que Sœur Matilde soit envoyée au Caire, mais pas quand il fait chaud; il suffit qu'elle vienne au mois de septembre, sauf s'il faut anticiper son départ pour d'autres raisons.


[6864]

En plus d'un résumé administratif sur une simple feuille, je vous prie de bien vouloir m'envoyer bien spécifié le montant des ressources, et des aumônes de Mitterrutzner ou d'autres personnes, en me disant qui nous a donné l'argent ; (sauf le montant de l'argent que je vous ai envoyé, ou que Giulianelli et moi nous vous enverrons. En un mot je vous demande un compte-rendu de tous les dons et de toutes les aumônes pour Vérone ou pour l'Œuvre depuis le 15 novembre 1880 jusqu'à aujourd'hui. Je pense que tout tiendra dans une demi-page.

Notez aussi la rente, c'est-à-dire la somme totale, du Buon Pastore. Mais peut-être que vous l'inclurez dans le bref compte-rendu. Il suffit que vous notiez les dons en espèces. Excusez-moi pour ce dérangement.


[6865]

Le jeune Abbé Africain Giovanni Farag m'a aussi écrit; il est très bon, et je lui répondrai que c'est une véritable tentation du démon que de penser vouloir échanger Rome contre Vérone. J'ai informé le Recteur du Collège Urbain de tout cela, et je lui ai laissé le soin de tout régler.

L'Eminent Cardinal Simeoni m'a écrit à propos de Lotermann. J'enverrai une lettre à l'Evêque de Gand et je lui expliquerai tout au sujet de Lotermann, je lui donnerai toutes mes facultés, je lui déclarerai que je dégage Lotermann de l'obligation de servir l'Afrique, et que c'est à lui que je le remets, qu'il en fasse ce qu'il veut, mais je le prierai seulement de faire savoir à Lotermann qu'il a l'obligation, dont je ne le dégage pas, de dédommager, quand il le pourra et comme il le pourra l'Institut de Vérone, avec une somme de 1.500 francs environ, pour les quatre années passées dans l'Institut.


[6866]

Dans votre lettre du 28 mai, vous m'écrivez : " Virginie, comme on le comprend dans les lettres de Monseigneur, lui écrit des mensonges, des exagérations, et Monseigneur en est affligé et ne dort pas ". Permettez que je vous parle avec le cœur sur la main et en toute franchise ; vous n'ignorez pas la haute estime que j'ai de vous, de votre admirable Institut, de Son Eminence; c'est à vous seulement que je parle, car vous avez la bonté de me parler clairement toujours pour de saints buts. Permettez que moi aussi pour de saints buts, je vous parle clairement, j'accepte avec plaisir toutes vos remarques.

J'aimerais que tous les hommes soient ainsi, mais la plupart sont des adulateurs. Ceci dit, vive l'Eminent Canossa! Il parle clairement, il sait châtier..., parfois exagérément car il pense ainsi maintenant, mais ensuite, il se remet en cause; et c'est cela qui fait un véritable honnête homme.


[6867]

Vous êtes un saint, vive Noé ! vous faites tout pour le bien, mais vous me concéderez que vous aussi vous êtes un homme, et que parfois vous pouvez vous tromper, comme je me suis moi-même trompé plusieurs fois.

Maintenant permettez-moi de parler clairement. Je pèche par excès d'estime pour Virginie et je la soutiens trop, et vous, avec Son Eminence vous êtes contre Virginie, cela à cause des sinistres opinions dont vous a fait part le perfide Grieff, à cause de Giacomo, un paysan stupide, dont je dois avoir à Khartoum des lettres pleines d'éloges pour Virginie, et à cause aussi de Stefano, un homme grossier. Ceux-ci, on me l'a dit à Vérone, sont même allés chez Son Eminence pour témoigner, etc.

Evidemment, le principal mobile est le zèle pour Jésus, et pour moi. Sans doute vous voulez que je sois respecté, qu'on ne jase pas sur mon compte, que je sois estimé comme il convient à un Evêque, et vous ne voulez donc ni voir, ni entendre quoi que ce soit qui puisse porter atteinte à ma réputation et à ma dignité... Pour tout cela, je vous suis et je vous serai toujours reconnaissant.

Pour moi, Virginie est trop digne d'estime, mais pour vous elle est vraiment digne de mépris, nous exagérons des deux côtés.


[6868]

En ce qui vous concerne je pense que vous aviez de bonnes intentions, mais aussi en ce qui me concerne, on doit faire entrer en ligne de compte différents aspects, à savoir : la raison pour laquelle j'accorde ma protection à Virginie.

Sœur Grigolini dit clair et net que j'ai été amené à être le défenseur tenace de Virginie tout d'abord par esprit de justice.

En effet, comme les Camilliens voulaient me ruiner, on a voulu la ruine de Virginie ; j'ai donc dû me défendre (par souci de justice, et le Saint-Siège aussi m'a défendu, et après toutes les accusations les plus infâmes dont j'ai été l'objet, il m'a nommé Evêque).

Moi j'ai voulu la défendre, parce qu'elle avait de grandes vertus, et parce qu'elle était innocente. A Vérone plus tard, suite aux premières attaques de Grief et de Giacomo, Virginie a toujours été repoussée (pas par la Supérieure qui en a pleuré plusieurs fois, et qui m'a assuré qu'elle n'était pas satisfaite ni contente que Virginie soit reléguée dans la dépendance du couvent, et elle me l'a dit plusieurs fois), mais elle et moi, nous avons été contraints de pleurer, de nous taire, et de lever les yeux vers Dieu, parce que si nous avions insisté, l'Œuvre en aurait souffert davantage, et nous vous aurions peut-être perdu comme Recteur. Pour éviter ce mal, j'ai sacrifié Virginie, et j'étais prêt à l'envoyer en Syrie comme elle le souhaitait, mais je n'ai jamais pu accepter cela, par peur de perdre son âme.


[6869]

Tous ces contrastes, et le fait de voir Virginie toujours repoussée, n'ont fait qu'augmenter ma bienveillance pour elle, car j'ai vu que je suis le seul à avoir le courage de la défendre à la pointe de l'épée. Il y a sans doute de l'exagération des deux côtés. Mon Dieu ! Tout le monde a agi en croyant faire le plus grand bien ; tandis que c'est un véritable martyre.


[6870]

Je déclare aussi, devant Dieu et devant tout le monde, que Virginie ne m'a jamais écrit les exagérations dont vous me parlez dans votre lettre.

Au contraire, elle a toujours parlé en bien de la Supérieure, mais elle m'a écrit que pendant la nuit elle pleure, qu'elle est la créature la plus malheureuse du monde, et elle a raison; et pourquoi ?

D'après tout ce qui s'est passé, depuis qu'elle a été reléguée dans la dépendance du couvent jusqu'au jour du refus réitéré de l'admettre au Noviciat, et du renvoi de son frère (pour lequel elle pleurait aussi en Afrique) sans qu'elle puisse lui parler (ce qui l'a fait beaucoup souffrir, même si vous avez bien fait de le renvoyer), suite à tout ce qui s'est passé entre elle et vous, elle a bien compris, et pressenti, que l'on ne voulait absolument pas entendre parler d'elle à Vérone, que l'on chanterait le Te Deum si elle partait, et si elle n'entendait jamais plus le nom de Comboni et de l'Afrique (alors qu'elle est la plus enthousiaste pour l'Afrique et pour son Chef, plus que tous et toutes les autres, elle en a donné la preuve pendant ses six années d'apostolat et de souffrances en Afrique).


[6871]

Elle s'est aperçu de tout cela dès le début; mais moi pas du tout, parce que je suis un nigaud. J'ai toujours espéré que l'Œuvre acquerrait ce sujet, qui en vaut cinq, quoi qu'on en dise. Elle a pleuré et elle pleure encore à cause de cela; et elle a cent raisons parce que, comme le dit l'Eminent, on chanterait le Te Deum si elle partait pour toujours.

Eh bien oui! on chantera le Te Deum et on le chantera bientôt (mais moi jamais ! Vous, Son Eminence et tous les autres vous pouvez penser ce que vous voulez mais moi je suis convaincu que son éloignement de l'Œuvre est un véritable malheur pour la Mission).


[6872]

Destiné à souffrir par la grâce de Dieu, et affligé pour cette pauvre malheureuse qui n'a personne, et dont je suis le seul père et le protecteur (pour autant qu'elle le sache, mais il y a d'autres âmes qui possèdent la vraie charité), et je m'en vante parce que j'espère une grande récompense de la part de Dieu pour ce que j'ai fait pour Virginie, car c'est un mérite plus grand que tous les autres pour les nombreux sacrifices que j'ai faits, et que je ferai pour les Noirs), et j'espère que, rien que pour cela, Dieu m'accordera le paradis, et grâce aux nombreuses prières que l'on fait pour Virginie, j'espère qu'elle aussi ira au ciel où elle découvrira le paradis. Il en est ainsi.

Ne vous offensez pas si je vous fais part de mon opinion. Je peux me tromper, je l'avoue; pour cela faites donc tout ce que vous pouvez pour l'Œuvre, j'ai entièrement confiance en vous et je suis satisfait de ce que vous faites (sauf en ce qui concerne l'affaire de Virginie).

Toutefois n'oublions pas que ni la sainteté, ni les prophéties, ni les miracles n'ont de valeur sans l'amour pour le prochain, pour les malheureux et les pécheurs, amour dont Sainte Angela Merici était un modèle.


[6873]

Permettez-moi de vous parler franchement à propos d'un autre cas, parce qu'en ce qui concerne l'apostolat et la connaissance du véritable Missionnaire, j'ai de l'expérience, et non des moindres.

Vous étiez sûr de bien agir en renvoyant tout de suite Giorgio ; les trois autres étaient du même avis, et d'après deux lettres que j'ai reçues de Giorgio, il méritait une punition. Mais permettez-moi de vous parler franchement.

Moi, peut-être (je dis peut-être) qui avec mes méthodes, et avec l'aide de Dieu, ai sauvé des milliers d'âmes que j'ai arrachées au diable, et rendues au Christ, peut-être - disais-je - que dans ce cas j'aurais fait d'une pierre deux coups, et j'aurais obtenu :


[6874]

1°. La punition de Giorgio avec charité, parce que la grâce de Dieu est infinie (rappelez-vous la conversion du Sénateur Littré, un des hommes les plus impies de notre siècle). Mais Giorgio a été abandonné, et ce sera un vrai miracle s'il peut se remettre sur le chemin de la vertu (et cela se réalisera parce que nous sommes arrivés à bon port).

2°. On aurait évité les excès de Virginie, qui pourra en revanche toujours dire :

" Ils ont enlevé et éloigné soudainement mon frère, comme s'il avait commis le plus grand des délits (et elle ne sait pas encore ce qu'il a vraiment fait), et ils me l'ont enlevé sans que j'aie pu lui dire un mot ; ils l'ont éloigné de moi, pas de Vérone pour l'envoyer à Avesa ou à Venise, mais en Syrie (Asie) ". C'est ce qu'on dit en Syrie. Et après ces justes plaintes de Virginie dans un moment de grande douleur et d'angoisse, on a le courage de dire qu'elle est orgueilleuse, arrogante, etc.… parce qu'elle a mal répondu ! Moi je n'ai jamais entendu ces réponses.


[6875]

Donc, je dis " peut-être". Je ne peux mesurer ici les conséquences funestes pour l'Institut, si Giorgio n'était pas renvoyé immédiatement et discrètement.

Je dis donc "peut-être", et je ne donne pas de jugement définitif, mais je m'exprime avec vous en toute confiance pour que vous sachiez tout, comme dans un cas de morale ou de dogmatique, d'autant plus que vous n'avez pas fait la moindre erreur, parce que vous avez agi après avoir entendu de vénérables conseils.

Ne vous découragez pas, et ne perdez pas confiance. N'oubliez pas que l'Œuvre, pour laquelle vous travaillez, appartient totalement à Dieu, et vous et moi, nous ne sommes que des Polichinelles maladroits, et sans l'aide divine, nous ferions mille fois plus de bêtises. Ne vous vexez pas à cause de votre amour-propre car il n'est pas encore assez fort pour ce qui concerne la vertu de la mortification, de la maîtrise de soi, de la volonté de porter la croix, du " se renier soi-meme" et du "n'être compté pour rien " (l'abneget semetipsum, et du nihilo reputari), parce que je vois qu'il (votre amour-propre) veut se justifier, mais sans nécessité.

Je vous ai clairement écrit que jamais ne m'est passé par la tète que vous ayez la moindre responsabilité à propos des infâmes insinuations de la lettre de Giorgio. Vous voulez vous défendre en disant : "Ce n'est pas moi qui ai suggéré cela à Son Eminence, et vous, vous l'avez fait dire par Son Eminence, etc.", et en m'écrivant que vous vous défendrez toujours. Vous avez raisons en tout, je dis bien en tout, vous avez entièrement raison, mais on voit bien, que même si vos intentions ont été pures et saintes, (pures, en ce qui concerne une solide et virile vertu et une vraie et profonde humilité), le désir de porter la croix et d'être anathème pour ses frères, comme l'Apôtre Paul (Rm. 9,3 ), est encore petit, et vous êtes encore très loin du renoncement de soi-même réel et profond.


[6876]

Pardonnez-moi, mon cher Père, si je me permets de faire le maître spirituel car je suis très en dessous de vous en ce qui concerne toutes ces vertus, sans compter la multitude de défauts et de faiblesses que j'ai, alors que votre vie est celle d'un ange.


[6877]

Mais je suis le Chef et le Fondateur de l'Œuvre apostolique la plus difficile, qui doit former des saints et des saintes pour convertir l'Afrique.

Dieu a voulu que vous soyez le premier instrument pour les former, et vous devez petit à petit apprendre ce qui est nécessaire, connaître parfaitement l'esprit humain, pour pouvoir former de saints apôtres... Je vous parle donc franchement, et avec une certaine prétention et je suis sûr que vous ferez de même avec moi, tout ceci pour la gloire de Dieu, pour mon humiliation, pour ma correction (parce que la perfection est une haute montagne, et je ne suis qu'au début de l'escalade), et pour le salut des pauvres Noirs qui sont les âmes les plus délaissées du monde.


[6878]

Mais vous vous direz : "Si je suis si enfantin, si j'ai si peu de vertus, et si je suis par conséquence incapable d'accomplir mon devoir qui consiste à former des saints, il vaut mieux que je m'enfuie, que je retourne dans mon couvent, et que Dieu envoie ici quelqu'un de meilleur et de plus vertueux que moi. Je n'ai pas l'espoir de réussir". Je voulais que mon Sembianti en arrive à ce point (parce que j'ai l'intention de le corriger ; je viens à peine de commencer, et cela pour sauver la Nigrizia, et pour le faire devenir saint).


[6879]

Ah, allez-y doucement, mon cher ! Il est vrai que vos vertus sont encore enfantines. Mais souvenez-vous d'un principe qui m'a été inculqué par le Père Marani, qui était plus rude que vous, qui avait des manières désagréables, et qui se montrait parfois peu charitable (et ne l'imitez pas du tout en cela).

J'étais en relation avec le Père Marani, lorsque j'étais grand séminariste; un jour j'ai fait ma confession générale auprès de lui, et il a donné le jugement définitif sur ma vocation (ce matin là, le Père Benciolini était dehors, et il attendait que je lui dise qu'elle était la réponse du Père Marani, c'était le 9 août 1857).

Le Père Marani m'a dit : "Je vous connais depuis que vous êtes grand séminariste, je vous ai donné des conseils, sur tous vos problèmes, alors que vous étiez séminariste et Prêtre. J'ai devant mes yeux, comme dans un miroir, toute votre vie ; tous vos problèmes, je connais votre défaut principal, et ce que vous avez fait pour le combattre... J'examine les vocations depuis 1820, et j'avais pour maître rien moins que l'Abbé Gasparo. Soyez tranquille et ne craignez pas (je tremblais comme une feuille parce que j'avais peur qu'il me dise que je n'avais pas la vocation pour l'Afrique, crainte que j'avais exprimée le 9 au matin au Père Benciolini, lequel m'a répondu : "Tu feras ce que le Seigneur voudra, va chez le Père Marani, et fais ce qu'il te dira), j'examine les vocations des Prêtres, des Religieux et des Missionnaires depuis de nombreuses années, votre vocation pour la Mission et l'Afrique est une des plus claires que j'aie pu voir. L'Abbé Vinco, le Père Jésuite Zara et l'Abbé Ambrosi et cent autres sont venus chez moi et j'ai examiné leur vocation. Votre vocation me semble la plus claire de toutes celles que j'ai vues. Je suis vieux, mes cheveux sont gris, et j'ai 67 ans, bientôt 68. Allez au nom de Dieu, et soyez content". Je me suis agenouillé, il m'a béni, et je l'ai remercié en pleurant de consolation. Tout de suite je suis allé tout raconter au Père Benciolini (qui riait). Je continue (veuillez excuser cette parenthèse).


[6880]

Cher Père, souvenez-vous d'un principe qui m'a été inculqué par le Père Marani : "Celui qui a confiance en soi-même, met sa confiance dans le plus grand âne du monde", et il ajoutait : "toute notre confiance doit être en Dieu".

C'est ce qui fait défaut à de nombreuses saintes personnes que je connais. Il y a de nombreux Jésuites, des Prêtres pieux et des Religieux qui portent un cilice et qui se frappent la poitrine, des Trappistes, des Chartreux et des âmes de grande oraison, etc. qui mènent une vie sainte, et qui disent tous qu'ils ont confiance en Dieu (je les ai vus de mes yeux, et entendus de mes propres oreilles, et pas uniquement des Religieux et des Prêtres, mais aussi des Prélats, des Evêques, et certains Cardinaux), ils disent que Dieu peut tout, que Dieu fera tout, qu'il s'occupera de tout, et ils disent qu'ils portent la croix en s'humiliant, en s'anéantissant, etc. ...

Mais quand la tempête arrive, quand manque l'espérance humaine, quand l'argent fait défaut... quand tout devient une lourde croix à porter et qu'arrive l'humiliation, quand ils s'aperçoivent qu'ils ne jouissent plus d'aucun crédit... ils tombent alors sous le poids, la confiance en Dieu est réduite à zéro (car ils avaient confiance en eux-mêmes, dans le plus grand âne du monde), et ainsi la véritable perfection s'est évanouie en fumée.


[6881]

Tout cela m'est arrivé une centaine de fois, et j'en ai conclu que le Père Marani avait raison, et que l'unique refuge et forteresse est de placer toute sa confiance en Dieu, qui est un honnête homme, le seul honnête homme, qui a un esprit, un cœur et une conscience, qui peut nous faire faire des miracles ; et j'ai fait l'expérience qu'une confiance totale dans les hommes ne nous rassure pas du tout, même s'il s'agit d'Evêques, de saints (mais qui mangent encore comme nous), de Cardinaux, de Princes, de Rois, d'hommes puissants, etc.

Bref, la confiance totale dans l'homme est sujette aux désillusions. (J'écris après m'être enfui trois fois de ma chambre dans laquelle il pleut, et après avoir changé la table de place trois fois aujourd'hui).


[6882]

J'ai dit que l'Abbé Marani était rude, parfois hargneux, et très peu charitable (s'il s'agissait de sa poche. En cela ne l'imitez pas ), mais l'Abbé Marani était un saint, un grand maître spirituel, un bon conseiller pour les âmes, un homme fait pour commander et pour se faire respecter, un grand connaisseur du cœur humain, il était un modèle pour les Prêtres sachant diriger, un zélateur des âmes, un véritable Missionnaire et père spirituel, qui n'avait pas fait de hautes études, mais qui connaissait très bien les sciences sacrées et qui savait comment diriger les âmes, car il avait étudié en profondeur, compris et dévoré un grand livre divin : "l'Abbé Gaspare Bertoni": qu'il repose en paix.


[6883]

Bien que vous soyez incompétent et que vous possédiez peu de vertus..., vous avez pourtant été désigné par Dieu (et rien n'est plus clair que le soleil) pour être le Recteur des Instituts Africains. Vous n'êtes pour rien dans cette affaire. Donc soyez assuré que vous vous acquitterez de votre tâche avec la diligence habituelle et la bonne volonté caractéristique des Religieux des Stigmates qui visent seulement la volonté de Dieu. Dépouillé de vous-même vous devez mettre votre confiance en Dieu et rester tranquille, et confiant qu'en tant que Recteur vous réaliserez ce qu'a fait, et même davantage, le vénérable Avila, le Général des Jésuites, parce que vous n'êtes que le simple instrument et le Polichinelle du Seigneur.


[6884]

Ne vous découragez donc pas si vous recevez des coups, pour vous détourner du droit chemin, car actuellement Satan mène, contre nous, une guerre terrible parce qu'il est en train de s'apercevoir qu'il devra bientôt déguerpir de l'Afrique, et que vous et moi (veuillez excuser la sainte humilité) nous sommes destinés à être ses principaux persécuteurs et ennemis.

Allez donc de l'avant, attendez-vous à recevoir de terribles coups, mais avancez toujours et taisez-vous.

Mon Dieu, quelle digression ! Mais revenons à vos lettres. Ne croyez pas que j'écrive si inconsidérément à des personnages sérieux sans relire mes lettres, comme un nigaud (or vos lettres sont compassées). Les lettres que je vous adresse vous permettent de mieux comprendre que je suis vraiment un type très ordinaire..., mais avec vous je me permets des familiarités, et si vous ne me les permettez pas, moi, je me les permets quand même. Je continue à vous écrire spontanément, et vous saurez qui je suis.

Mais avec les grands, avec les Rois (hier, j'ai reçu une belle lettre du roi des Belges), avec les Cardinaux... de Rome, etc., j'écris comme si j'étais un homme sérieux, et avec ma... je réussis à être considéré comme tel.


[6885]

Je suis tellement opprimé et affligé, que je change de sujet sans m'en rendre compte. Savez-vous pourquoi je vous ai cité les propos du Père Marani au sujet de ma vocation ?

Certains fous de Vérone, aux idées étroites, ne comprennent rien, et veulent pontifier et prendre des décisions pour le prochain. Mais vous êtes un homme qui comprend. Allez donc de l'avant.

Je vous ai évoqué cela uniquement pour vous dire qu'au cours de mon activité ardue et laborieuse, j'ai eu plus de cent fois l'impression d'avoir été abandonné par Dieu, par le Pape, par les Supérieurs, et par tous les hommes (quand j'étais sous le poids des afflictions et des désolations les plus terribles, seule une personne ne m'a pas abandonné, et quand elle pouvait me parler, elle me réconfortait, et m'aidait à placer toute ma confiance en Dieu, unique protecteur de l'innocence, de la justice, et des œuvres de Dieu ; et cette personne est Virginie Mansur).


[6886]

En me voyant ainsi abandonné et désolé, j'ai eu cent fois la très grande tentation (et j'ai même été poussé par des hommes pieux, respectables, mais sans courage, ni confiance en Dieu) de tout abandonner, de remettre l'Œuvre à Propaganda Fide, et de me mettre comme un humble serviteur à disposition du Saint-Siège, du Cardinal Préfet, ou d'un Evêque. Mais ce qui m'a aidé à ne pas laisser tomber ma vocation (au moment où j'était accusé par la plus haute autorité, pour ainsi dire, de vingt péchés capitaux, alors qu'il n'y en a que sept ; et même quand j'avais 70.000 francs de dettes, et que les Instituts de Vérone étaient désorganisés, qu'il y avait beaucoup de morts en Afrique Centrale, et alors que j'avais la fièvre à Khartoum et que je ne voyais aucune lumière au bout du tunnel, mais seulement des ténèbres), ce qui a soutenu mon courage pour rester là jusqu'à ma mort, ou jusqu'à ce que des décisions différentes soient prises par le Saint- Siège, a été la conviction de la certitude de ma vocation; et il en a toujours été ainsi parce que le 9 août 1857, après avoir longuement réfléchi, le Père Marani m'avait dit: "votre vocation pour les Missions de l'Afrique est une des plus claires que j'aie pu voir ."


[6887]

Vous vous trouvez donc dans la situation même où je me trouvais.

Vous êtes sûr que Dieu veut que vous soyez le Recteur des Instituts Africains. Votre âme, faible, petite, fragile, et votre vertu enfantine ne doivent vous décourager en aucune circonstance défavorable (jusqu'à présent, vous avez marché sur des roses, mais vous rencontrerez aussi les épines), vous devez aller de l'avant sans souffler mot, et sans jamais dire au Supérieur : "Je n'en peux plus, je suis découragé, j'ai affaire à des fous, surtout à ce fou de Monseigneur Comboni qui passe du coq à l'âne, qui cause de la confusion, qui dit, et se dédit de ce qu'il affirme, etc. etc. Je voudrais rester tranquille et retourner au couvent des Stigmates". Faire ainsi, mon cher, signifierait, pour vous, rester toujours un petit enfant pour ce qui concerne la vertu. Soyez donc courageux, allez de l'avant, et nous nous retrouverons au ciel.


[6888]

Dès la première fièvre, l'Abbé Bortolo s'est découragé, et il est revenu sur ses pas (il était en voyage entre Khartoum et le Cordofan); la fièvre a continué pendant quelques jours et, découragé, il m'a supplié de le laisser partir parce que sa santé était mauvaise. Il m'a répété la même prière par écrit alors que j'étais à El-Obeïd. Puis, il lui a semblé qu'il allait mieux.

Nous avons tous enduré des fièvres bien plus terribles, surtout les Sœurs Victoria et Concetta. Chaque année Sœur Concetta souffre de maladies trois fois plus fortes que celles de l'Abbé Bortolo, mais personne ne m'a jamais demandé de repartir.

L'Abbé Bortolo m'a écrit (j'allais partir pour la régions des Nouba) que si j'étais d'accord, il pouvait risquer de rester, mais aux conditions suivantes: être responsable de tout avec l'Abbé Losi, être Vicaire Général, Administrateur Général, ne jamais dépendre de moi, sauf pour me dire ce qu'il fera...

Il avait ainsi l'intention de prouver qu'il pouvait partir en toute liberté, quand il voulait, si le travail ne lui convenait pas (il n'a aucune capacité) et qu'il pouvait aller où il voulait, qu'il n'était lié à la Mission par aucun serment.


[6889]

Nous avons pensé : "S'il souffre à nouveau de très fortes fièvres comme avant, il demandera tout de suite à partir en Europe...".

Je n'ai rien dit parce que j'avais déjà répondu positivement à sa première demande et que je lui avais donné une autorisation de départ. Ceci comme supplément de ce que j'avais dit à propos de l'Abbé Bortolo, en répondant à votre lettre N° 26, ou vous dites : " Je serais content que l'Abbé Bortolo puisse rester à l'intérieur".

Pour ce qui concerne Sestri, nous sommes d'accord : faites ce que Son Eminence ordonne.

C'est très bien que Sœur Matilde soit destinée au Caire, parce que je crois que la suppression de Sestri est maintenant un fait accompli.

J'ai envoyé à Giorgio l'attestation de son abjuration, parce qu'un Franciscain a refusé de le confesser car il croit qu'il est encore schismatique. Priez pour Giorgio.


[6890]

Ne serait-il pas bon que vous demandiez à Son Eminence de parler à l'Abbé Tomba pour Giovanni Beltrame, l'ennemi principal de l'Oeuvre ?

Je crois que oui. J'ai beaucoup d'arguments pour démentir les mensonges arrogants qu'il a publiés. Selon lui personne n'a voulu l'aider pour rédiger le dictionnaire et le précis de grammaire Denka, et il dit qu'il a été le premier à faire ce travail alors que ce n'est pas vrai; Mozgan et Lanz ont été les premiers, et avec Lanz, l'Abbé Beltrame, l'Abbé Melotto et moi-même, avons rédigé ensemble le dictionnaire, le précis de grammaire, et un long traité de la religion catholique, que j'ai ensuite enseigné aux institutrices de Vérone. Or, à Khartoum, l'Abbé Losi avait emprunté un gros volume en langue Denka, et il me l'a rendu ici chez les Nouba, il s'agissait du traité général de Religion que l'Abbé Beltrame et moi avions aussi. Mitterrutzner possède le dictionnaire et le précis de grammaire.


[6891]

En outre, je ferai imprimer les sermons de Lanz et un grand Catéchisme, œuvre entièrement réalisée par Lanz. Ce dernier est mort en 1860 assisté par le Pro-vicaire et par l'Abbé Beltrame, avant que Beltrame ne commence à perfectionner le travail fait en commun, qu'il a fait imprimer il y a quelques années seulement. Il existe des textes Denka composés par Lanz qui ont été rédigés avant que nous n'arrivions chez les Kichs, alors qu'en avril 1858 nous commencions ensemble à apprendre le b.a.-ba de la langue Denka.

C'est un brigand, un orgueilleux, un égoïste, un homme plein de jalousie comme me l'a dit deux fois le Ministre Cesare Correnti en souriant. J'ai dit cela à Baschera. La pauvre Comini, s'est perdue à cause de l'Abbé Beltrame. Cela suffit, c'est un véritable libéral moderne, c'est tout!


[6892]

Pour ce qui concerne Spazzi, la Vicaire des vielles depuis longtemps, mon opinion, qui est aussi celle de Sœur Teresa, est qu'elle ne renouvelle plus ses vœux, et si elle ne reste pas tranquille avec les vieilles, il faut la renvoyer chez elle. Ce que vous ferez sera bien fait.

Le gros livre des Messes chantées emporté par l'Abbé Policarpo se trouve à Khartoum. C'est du moins ce que l'Abbé Luigi m'a assuré. A la première occasion sûre, je l'enverrai à Vérone. Cependant, rappelez-le moi encore. J'ai écrit une note pour m'en rappeler.

J'ai consigné à l'Abbé Losi 20 francs, de la part d'un monsieur de Plaisance, etc. Vale. Mon Dieu ! que je suis épuisé et à bout de forces ! Que la volonté de Dieu soit faite. Je bénis l'Abbé Luciano etc. Priez pour


+ Daniel Evêque


1092
Son Père
0
El-Obeid
18. 07. 1881

N° 1092; (1046) - A SON PERE

BQB, sez. Autografi, c. 380, fasc. II, n.3

Vive Jésus, Marie et Joseph !

El-Obeïd, le 18 juillet 1881

Mon très cher Père,

[6893]

Aujourd'hui j'ai célébré une Messe et j'ai beaucoup prié pour maman.

Le 21, c'est la Saint Daniel le prophète, le jour de ma Fête. Ce jour là, notre église, qui est la plus grande de l'Afrique Centrale, sera décorée par tous les chrétiens, bons et mauvais, qui assisteront avec les membres de nos deux établissements de cette capitale à la Messe Pontificale, que je célébrerai après avoir solennellement baptisé de nombreux adultes, et administré le Sacrement de la Confirmation.

Mes Missionnaires en ont décidé ainsi bien que j'eusse préféré que la fête de Saint Daniel passe inaperçue.


[6894]

J'ai aussi baptisé 8 adultes chez les Nouba. J'ai fait dans cette région une fatigante mais importante exploration de plus de 50 collines, à cheval ou à pied, en dormant sur une natte, mangeant sans sel, et sous le poids de nombreuses mais chères privations. Mais quand on travaille pour Jésus, tout devient plus agréable. Nous avons gravi à pied le mont Carchendi sous un soleil de plomb, et j'avais laissé mon cheval avec les 6 gardes turcs dans la plaine. J'étais accompagné par les Abbés Bonomi, Vincenzo Marzano, Léon Henriot, et par notre excellent laïc Giuseppe Regnotto de Chiesanuova, compatriote de l'Abbé Squaranti.

Nous nous sommes couchés à l'ombre sur des bouts de bois noueux, entourés par une grande foule de Noirs grands et petits, de femmes jeunes et vieilles, tous suivaient la mode de nos premiers parents, Adam et Eve avant qu'ils fassent la bêtise de pécher.


[6895]

Nous sommes arrivés à 4 heures de l'après-midi sans que quelqu'un ait pensé à nous donner à manger, nous étions à jeun depuis la veille.

Mes compagnons qui avaient l'estomac dans les talons, se présentèrent chez le Chef et lui demandèrent quelque chose à manger. Au même moment, un vieux et gros coq chanta en secouant ses ailes, comme s'il voulait nous saluer.

Le malheureux, 15 minutes après, était tué, plumé, posé sur des braises, et apprêté devant nous tel quel sans sel ni autres condiments. Nous l'avons partagé et mangé ou plutôt englouti pour qu'il fasse la sieste dans notre estomac.

Puis, nous sommes repartis, mais à mi-chemin vers la montagne la pluie nous a surpris, et nous nous sommes abrités dans la cabane d'un Africain qui nous a offert une espèce de polenta cuite dans une eau amère sans sel ni condiment.

Nous avons mangé joyeusement en nous souvenant du risotto de la Famille Grigolini chez Mariona où, vous aussi, avez mangé avec le Recteur Dorigotti et les Prêtres de Saint Martin et de Montorio...


[6896]

Avec le Gouvernement du Soudan j'ai préparé un plan pour abolir la traite des Noirs dans ces montagnes des Nouba dont chaque année habitants sont décimées. Les Chefs, les Cogiours, et les Sultans de la région se sont mis à mes pieds en me conjurant de les libérer de ce fléau, car depuis 1838, quand le noir Bachit Miniscalchi a été enlevé, jusqu'à aujourd'hui, cette population a été presque entièrement détruite, elle a été réduite de 15 à 1.

Je réussirai, parce que je suis appuyé par le Gouvernement, et un capitaine, inspecteur français de Paris (ayant reçu l'ordre de se faire conseiller par moi) loge dans notre maison de Delen avec une troupe de soldats.

Le premier coup de fusil a fait périr un Chef, et on a déjà enchaîné un autre Chef des Bagarras, ceux même qui avaient enlevé Bachit. La terreur s'est répandue chez ces brigands et assassins qui auparavant étaient protégés par le Gouvernement, mais qui ne le sont plus maintenant.

Dans 6 mois, l'abolition de la traite sera un fait accompli, et ce sera un grand honneur pour l'Eglise et la Mission, qui en ont été l'instrument le plus fort pour la gloire de Dieu et le bien de ces populations malheureuses.


[6897]

Je suis actuellement en pourparlers avec Gieglar Pacha, qui a été envoyé de Khartoum pour arrêter les Chefs de bande, pour en pendre quelques-uns, pour séquestrer les chevaux des Baggaras, et pour prendre les mesures nécessaires.

Je n'ai fait qu'exposer les faits, et la situation réelle à propos des centaines de riches qui sont devenus puissants grâce au sang des Noirs, en commettant les crimes les plus horribles, en vendant et en prostituant des milliers de filles honnêtes, qui ont perdu la vertu et la vie. J'ai laissé au Gouvernement la charge de prendre les mesures appropriées.


[6898]

Le Gouvernement est aussi d'avis que sans la force, on n'arrivera à rien, comme cela s'est passé jusqu'à présent. Je n'ai pas répondu, mais je me suis dit qu'il a raison. Car pour sauver 10 brigands assassins, on ne doit pas sacrifier des milliers d'innocents. Il faut que les assassins soient pendus et que les innocents soient sauvés : pour les premiers, le gibet et l'enfer, et pour les seconds, la liberté et le paradis. Telle est la justice du Dieu que j'adore.

Je ne sais pas encore quand je partirai d'ici, parce qu'il faut peut-être que je fasse changer d'air l'Abbé Fraccaro Giovanni Battista, le Supérieur d'ici, qui est souvent malade.

Mais écrivez-moi à Khartoum, où je serai peut-être dans deux mois.


[6899]

En ce qui concerne les deux dernières lettres que j'ai reçues dans lesquelles vous me parlez de votre correspondance épistolaire avec la Supérieure de Vérone et avec Vérone au sujet de la bonne Virginie, je n'ai rien à dire.


[6900]

Que le Seigneur soit toujours avec vous, et j'espère qu'il sera aussi toujours avec moi, parce que je l'ai toujours servi, je le sers maintenant, et je le servirai toujours jusqu'à la mort parmi les plus grandes croix et les plus grandes souffrances, et en sacrifiant ma vie.

Je vous bénis, ainsi que tous les parents et les amis et je vous prie de saluer de ma part le nouveau Curé de Limone dont vous m'avez parlé mais sans me dire ni son nom, ni son prénom, ni ses origines, ni son âge,... et écrivez à Erminia en la priant en mon nom de me donner des nouvelles de sa famille, et en particulier d'Eugenio. Saluez Pietro, son épouse, son fils, et ceux de Riva.



Votre affectionné fils

+ Daniel Evêque

P.S. Donnez cette image pieuse au nouveau Curé.


1093
Abbé Francesco Giulianelli
0
El-Obeid
23. 07. 1881

N° 1093; (1047) - A L'ABBE FRANCESCO GIULIANELLI

ACR, A, c. 15/ 29

El-Obeïd, le 23 juillet 1881

Ordre de dépenses.

1094
Card. Giovanni Simeoni
0
El-Obeid
24. 07. 1881

N° 1094; (1048) - AU CARDINAL GIOVANNI SIMEONI

AP SC Afr ; C., v. 9, ff. 149-150v

N° 10

El-Obeïd, le 24 juillet 1881

Eminent et Révérend Prince,

[6901]

De retour de la visite pastorale au Djebel Nouba, j'ai trouvé ici vos vénérables lettres du 22 et du 28 avril dernier ; dans la première, vous m'annoncez que le Sous-Diacre Agostino Lotermann, de Belgique, insiste encore pour que je le délie du serment de servir la Mission et que je lui envoie l'Exeat ; dans la seconde lettre, vous me faites savoir que M. Giuseppe Genoud de Bolzano insiste pour que je lui envoie des souvenirs de son fils l'Abbé Policarpo, qui est mort à Khartoum en 1878.


[6902]

En ce qui concerne la première personne, j'ai refusé jusqu'à présent de délier Lotermann de son serment de servir la Mission, non pas parce que j'espérais qu'il ait à nouveau la vocation, mais au contraire, dès qu'il m'a écrit que ses parents ne le laissaient plus partir d'Italie, parce qu'il souffrait de la chaleur, et que je lui envoie donc l'Exeat, je lui ai répondu que je le déclarais pour toujours démis de mon Institut (je ne l'aurai pas repris pour tout l'or du monde, parce que je me suis rendu compte qu'il n'a jamais eu la vocation, qu'il s'est toujours joué de nous, et qu'il fait semblant d'être un saint pour extorquer l'Ordination), parce que, malgré ses promesses, il n'avait même pas donné un centime pour payer la pension habituelle que ceux qui ne sont pas pauvres payent pendant la mise à l'épreuve.

Et comme, depuis la Belgique, il faisait aussi de grandes promesses pour remplir ses obligations, promesses qu'il n'a pas du tout tenues, j'ai refusé ce qu'il demandait.

A présent en suivant votre sage conseil et à la demande de Votre Eminence, je me ferai un devoir d'envoyer à son Evêque de Gand (je ne me souviens plus du village de Loterman) non seulement l'Exeat avec le dégagement de l'obligation de servir la Mission, mais aussi une information brève et précise sur ce jeune pendant les quatre années qu'il a passées dans mon Institut, où pour ce qui concerne la conduite il s'est admirablement comporté.


[6903]

Quant à l'affaire de Genoud, dès que Monseigneur Rampolla m'a prié de faire parvenir au père quelques souvenirs de son fils Policarpo mort à Khartoum, j'ai écrit au Supérieur de cet établissement, en lui ordonnant d'envoyer à mon Recteur de Vérone tout ce qu'il pourrait trouver ayant appartenu au défunt Missionnaire. Trois mois après, le Supérieur m'a répondu qu'il n'avait rien trouvé, et qu'il ne savait pas où il pourrait trouver des objets ayant appartenu au défunt, parce qu'au moment de sa mort, il se trouvait au Djebel Nouba.

En effet, je me suis souvenu qu'il ne pouvait rien y avoir, car j'étais présent au moment de sa mort et j'avais donné l'ordre de brûler et d'enterrer dans le désert tout ce qu'il y avait dans sa cabane, car il était mort à cause du typhus pétéchial, qui est une des maladies les plus contagieuses, une véritable peste.


[6904]

Mais comme je suis passé à Bolzano l'été dernier, j'ai fait savoir à M. Genoud par l'intermédiaire du Doyen que dès mon arrivée dans le Vicariat, je ferais tout mon possible pour trouver quelque souvenir.

Quand je suis arrivé à Khartoum, j'ai trouvé quelques objets qui avaient appartenu au défunt : des médailles militaires qu'il avait reçues lors de la campagne Austro-italienne de 1866, une montre turque qui lui appartenait, et d'autres choses.

J'ai tout remis au Supérieur de Khartoum au mois de février dernier pour qu'il les remette entre les mains de l'Agent Consulaire d'Italie, qui devait partir peu de temps après pour Vérone. Ici à El-Obeïd, j'ai trouvé une autre montre magnifique qu'il possédait à Bolzano et que son pieux père connaissait, il y avait aussi de la musique composée par Policarpo, et d'autres choses, que j'enverrai rapidement à M. Genoud, dèe mon retour à Khartoum.

Je m'incline pour embrasser votre Pourpre Sacrée, et je me déclare avec la déférence la plus profonde



votre humble et obéissant fils

+ Daniel Evêque de Claudiopoli

Vicaire Apostolique de l'Afrique Centrale


1095
Can. Camillo Mangot
0
El-Obeid
26. 07. 1881

N° 1095; (1049) - AU CHANOINE CAMILLO MANGOT

AGSR, Carte Mangot

El-Obeïd, le 26 juillet 1881

Très cher Monsieur le Chanoine,

[6905]

L'autre jour, j'ai reçu de Delen la lettre ci-jointe de notre cher Abbé Losi ; je ne veux pas vous l'envoyer sans vous parler de ce pieux ouvrier évangélique qui a touché mon cœur lors de ma visite pastorale.

La Mission du Dar-Nouba est une des plus importantes, bien qu'elle soit la plus difficile et la plus laborieuse d'Afrique Centrale. Elle est habitée par un peuple primitif qui vit encore dans la nudité la plus complète comme Adam et Eve au paradis. Mais malgré tout cela, malgré les malheurs séculaires de l'horrible traite des esclaves qui, chaque année, a décimé ces malheureuses populations et les a presque détruites, ou certainement réduites de 12 à 1, ce peuple a une bonne moralité, possède un tempérament de fer, il est laborieux, et grâce aux immenses efforts de la Mission, il baissera la tête devant la Croix, et il deviendra une part choisie du troupeau du Christ.


[6906]

Grâce aux démarches que j'ai faites pour avoir la force de faire cesser l'esclavage, j'ai atteint des résultats remarquables ; et par l'intermédiaire du Gouvernement, ou mieux grâce aux intentions droites et à la détermination de Son Altesse le Khédive d'Egypte, et de son digne représentant Rauf Pacha Gouverneur Général du Soudan (territoire cinq fois plus grand que la France), j'espère que d'ici un an, la traite des esclaves dans les tribus des Nouba sera presque complètement abolie. Cela nous permettra facilement d'amener à la Sainte Religion ces régions, qui reconnaissent en nous le principal agent de leur libération.


[6907]

Quand l'Abbé Giovanni était à El-Obeïd en 1877, il m'a écrit qu'il serait très content si je l'envoyais au Djebel Nouba, parce que, l'Islam y dominant peu ou pas du tout, il espérait que ces Africains adopteraient plus facilement le catholicisme. J'ai accepté sa requête, et je l'ai envoyé là-bas sous la responsabilité du Supérieur de la Mission l'Abbé Luigi Bonomi, avec qui il a étudié les premiers rudiments de la langue Denka, langue qui est encore inconnue de la science, et que nos deux zélés Missionnaires, avec une ardeur et des efforts incroyables ont commencé à apprendre, mot à mot, et de vive voix, des gens.


[6908]

Après que j'aie rappelé à Khartoum le Supérieur de cette Mission l'Abbé Bonomi, pour qu'il me représente en tant que Vicaire Général durant mon voyage en Europe, l'Abbé Losi a continué tout seul la difficile et importante étude de cette langue. Ainsi quand au mois de mai dernier, je suis arrivé dans cette Mission avec les Missionnaires et les Sœurs, notre Abbé Losi avait rédigé un dictionnaire de plus de 3.500 mots en langue nouba, en arabe et en italien, un catéchisme catholique en nubien, et a traduit dans cette langue les principales prières de notre sainte Foi. Bien qu'il soit difficile de se faire comprendre par ces gens, il a tout de même réussi à en convertir quelques-uns à la Foi ; il a baptisé beaucoup d'enfants à l'article de la mort, et, avec l'éloquence sublime d'une conduite irréprochable vraiment chrétienne et sacerdotale, il a fait aimer et estimer le catholicisme.


[6909]

Fait admirable et fort édifiant, il a construit une belle église en pisé, en la couvrant de paille. Lors de la fête du Corpus Domini, j'y ai baptisé quelques adultes, et j'ai administré le sacrement de la Confirmation à une quarantaine de chrétiens. Quand il a des moments libres, il est toujours à l'église pour prier, il dit le Bréviaire presque toujours à genoux, il passe une grande partie de la nuit à l'église, et le dimanche et les jours de fête, il prêche en arabe deux fois par jour.

Il n'a presque pas de besoins, la nourriture la plus maigre est déjà trop pour lui ; il dort par terre, ou bien, allongé sur une natte, toujours habillé.

Quand il a été frappé par des fièvres brûlantes, je l'ai prié d'accepter au moins un coussin, mais il l'a refusé.

Il jeûne souvent ; il est jeune, mince, et plein de vie quand il s'agit de prier, de parler de Dieu, de sauver des âmes. Il a aussi un très grand zèle pour les âmes, qui lui donne de la force même au milieu des privations et des plus grands sacrifices.


[6910]

En un mot, l'Abbé Giovanni Losi est une perle d'ouvrier évangélique, c'est l'ange de la Mission ; et j'ai été tellement édifié pendant les 46 jours passés avec lui lors de ma visite et de mon exploration dans cette importante tribu, que mon cœur en a été réjoui. L'Abbé Giovanni est vénéré et aimé par ces gens comme un véritable père. Ils font toujours appel à lui ; et j'espère qu'il sera le premier et le plus efficace instrument de la conquête à la Foi de ces âmes délaissées.

C'est admirable ce que j'ai vu de mes yeux et touché du doigt.


[6911]

L'Abbé Losi est toujours entouré de personnes rustres, nues comme Adam et Eve, des gens qui ne connaissent que le délit, les turpitudes et les biens fugaces de ce monde. Il est le témoin oculaire des horribles méfaits des brigands Baggaras qui vivent d'assassinats, de vols et d'infamie, et bien qu'entouré par tout ce qu'il y a de plus abject et de plus abominable sur cette terre, il conserve toute la ferveur de sa dévotion et de l'esprit de piété comme le plus fervent des novices Jésuites.

Il aime Dieu, l'Eglise et les Saints. C'est une âme qui appartient totalement à Dieu, que me fait souhaiter ardemment d'avoir d'autres fils pleins de la ferveur du grand Martyr de Thèbes, qui a conservé sa Foi et sa ferveur dans le noble diocèse de Plaisance, dont le souvenir ne peut être effacé de mon esprit et de mon cœur.


[6912]

Je pense que cela n'a pas été désagréable pour vous, que je vous aie parlé de mon cher fils, qui est aussi votre cher ami.

L'abbé Bortolo Rolleri n'est pas comme lui (que cela reste entre nous).

Je l'ai moi-même amené dans le Vicariat, mais quand la fièvre l'a frappé pour la première fois, il m'a plusieurs fois supplié de le laisser retourner en arrière.

Rolleri est un Prêtre dont la conduite est bonne, mais il est incapable (après dix ans en Afrique) de faire le catéchisme aux jeunes, de prêcher dans aucune des langues parlées ici, et de traiter sérieusement une affaire avec les Africains.

Il n'arrive pas à la cheville de l'Abbé Losi. J'ai satisfait sa demande, et à cette heure, il est sûrement en train de boire les eaux de Pejo ou de Recoaro ; que cela reste entre nous.


[6913]

Saluez de ma part vos vénérables collègues, Monseigneur l'Archiprêtre, Rossi, le Recteur du Séminaire, tous les Messeigneurs et les Chanoines, les Prêtres, mes connaissances de Plaisance, et mes pieuses dames, que j'ai toujours à l'esprit, même si je ne peux jamais leur écrire.

L'église la plus grande et la plus belle de toute l'Afrique Centrale, ici, est presque finie. Je l'ai consacrée à Notre Dame du Sacré-Cœur.

Présentez mes hommages au Révérend et cher ange du diocèse de Plaisance Monseigneur Scalabrini, au Vicaire Général, à l'Abbé Camillo et au Séminaire Albenori. Vale, et (....).



Bien à vous dans le Christ

+ Daniel Comboni Evêque

et Vicaire Apostolique


1096
Card. Giovanni Simeoni
0
El-Obeid
27. 07. 1881

N° 1096; (1050) - AU CARDINAL GIOVANNI SIMEONI

AP SC Afr. C., v.9, ff. 145-148

N° 11

El-Obeïd, le 27 juillet 1881

Eminent et Révérend Prince,

[6914]

Ne faites pas attention à cet en-tête irrégulier : Episcopatus et Vic., car ce n'est pas ma faute. A Rome, l'Abbé Antonio Dobale, élève du Collège de Propaganda Fide, a fait imprimer un tel en-tête sur deux rames de papier par le Chevalier Melandri, et il me les a apportées à Khartoum. Puisque je me servirai souvent de ces feuilles pour écrire à Votre Eminence et à la Sacrée Congrégation, cette explication est valable pour toutes les lettres que vous recevrez.


[6915]

La nomination de l'éloquent et valable Père Anacleto de San Felice au poste de Vicaire et Délégué Apostolique d'Egypte (ce n'est pas correct de dire de l'Arabie, c'est une erreur dans la terminologie de la Curie Romaine, parce qu'en Arabie il n'y a jamais eu et il n'y a actuellement ni Evêque, ni églises, ni paroisses, pas même un catholique de Rite Oriental, sauf le concubin Nicola Mardrus, de rite arménien, qui habite à Gedda, et que j'avais poussé à accorder quelques subsides à ses concubines abyssiniennes, et à rentrer au Caire sa patrie pour se marier chrétiennement, car il avait les bons exemples de ses sages frères.

Il a sûrement fait tout cela à cette heure), cette nomination, disais-je, du Père Anacleto, si elle ne réussit pas à éliminer totalement le pernicieux monopole franciscain sur l'apostolat catholique en Egypte (car personne ne donne des verges pour se faire fouetter ) amènera à l'Egypte plus d'avantages que Monseigneur Ciurcia n'a pu en apporter, soit parce que ce distingué Prélat est imprégné des principes de la Sacrée Congrégation de Propaganda Fide qu'il a servie avec beaucoup de zèle et d'intelligence depuis 1877, soit parce que c'est un homme d'action, fin et expérimenté pour traiter les dossiers comme il l'a démontré dans l'affaires du Couvent de San Bartolomeo de l'Ile, qu'il a sauvé des crocs du démon, soit parce qu'il fera résonner son éloquente voix sur les chaires d'Alexandrie et du Caire avec beaucoup de profit pour les milliers d'italiens et d'étrangers qui comprennent l'italien, avec un grand profit pour les âmes. Car en Egypte, les gens sont avides d'entendre la Parole de Dieu (qu'ils n'ont jamais entendue de mémoire d'homme des lèvres d'un Evêque, parce que Monseigneur Ciurcia ne prêchait pas, et que les Franciscains ne laissaient jamais prêcher un orateur qui n'était pas de l'Ordre Séraphique).

J'espère que Monseigneur Anacleto sentira tout d'abord le devoir d'être Pasteur et ensuite Franciscain, surtout en accordant les pleines facultés aux Jésuites, qui sont nombreux et qui possèdent toutes les qualités et le personnel pour faire des miracles en Egypte.


[6916]

Comme Votre Eminence, et d'autres personnes à Rome, m'ont assuré que le Saint-Père ou la Sacrée Congrégation, ou Votre Eminence, ont décidé de créer à Propaganda Fide un magnifique Musée, qui rassemblera des objets provenant de toutes les Missions de la terre, je vous ai donc envoyé, par l'intermédiaire de M. Marquet, deux magnifiques défenses d'éléphant (c'est de l'ivoire très fin) de grandeur inhabituelle, les deux pesant plus de cent kilogrammes, pour qu'elles soient exposées dans ce Musée Pontifical de Propaganda Fide, avec l'approbation de Votre Eminence. Quand je serai dans ma résidence à Khartoum, je vous en enverrai la description précise de l'origine, de la qualité, etc., parce que je n'ai pas le temps maintenant. Plus tard, je vous enverrai d'autres objets intéressants de l'Afrique Centrale.


[6917]

Je n'ai pas le temps non plus de vous informer au sujet de la remarquable exploration que j'ai faite dans les principales régions du Djebel Nouba, où il y a plus de 50 collines. L'enthousiasme de ces Africains était tel qu'ils se prosternaient à mes pieds pour me supplier de les libérer des horreurs de la traite des esclaves, qui a détruit près de neuf dixième de ces populations.

Je n'ai pas le temps de vous parler du Gouvernement qui a accepté mon plan de libération, et qui a commencé à le mettre en pratique, ni de l'espoir inébranlable d'en tirer un grand profit pour notre sainte Religion, ni de la terreur des chefs assassins (l'un d'entre eux a assassiné des centaines de Nouba, et a fait des milliers d'esclaves) qui cherchaient et cherchent mes faveurs et ma protection auprès du Gouvernement pour ne pas subir le gibet, l'exil ou une autre punition...


[6918]

Grâce aux incroyables efforts de deux de mes Missionnaires, on a réussi à composer un dictionnaire de la langue nubienne, et un catéchisme, et aussi traduit toutes les prières.

J'ai tracé avec précision une carte géographique, la seule qui soit aussi exacte, et je l'enverrai à Votre Eminence.

A Delen j'ai baptisé solennellement neuf adultes, et donné le sacrement de la Confirmation à 43 adultes ; ici, j'ai baptisé 8 adultes et donné le sacrement de la Confirmation à 67 adultes. Quand j'aurai fait apprendre la difficile langue des Nouba aux Missionnaires et aux Sœurs, nous aurons un ferme espoir d'avoir de bons résultats.

Mais je présenterai tout dans le Rapport Général du Vicariat que je vous enverrai dans le courant de l'année.

Nos souffrances sont indicibles : nous souffrons de la chaleur, des fièvres, des épuisements, de l'inappétence, de la faim, de la soif et des privations.

Mais je suis heureux que mes Missionnaires et mes Sœurs aient un esprit d'abnégation et de sacrifice que je n'ai jamais vu dans aucune autre Mission, parce que dans aucune autre partie du monde on ne souffre comme en Afrique Centrale.


[6919]

Je vous raconte une anecdote, puis je m'arrête.

Mes Missionnaires Bonomi, Henriot, Marzano (auquel j'accorde maintenant trois mois de repos bien mérité pour aller rendre visite à son vieux père, dont il est l'unique fils. Son père avait plusieurs fois supplié la Sacrée Congrégation pour me pousser à donner à son fils l'autorisation de rentrer ; il se présentera donc chez vous et à Propaganda Fide à l'automne prochain) et moi, nous sommes partis à pied de Nama, capitale du Golfan, et au bout de trois heures de marche sous un soleil brûlant qui nous grillait le crâne, nous sommes arrivés sur le mont Carchendi. Epuisés, nous nous sommes reposés, puis nous avons gravi le mont, où des Africains vivent dans des fortifications pour ne pas tomber dans les mains des Bagarras, les brigands qui ont détruit les neufs dixième de la population qui habitait dans la plaine, ainsi que le bétail et les denrées alimentaires.

Nous avons donc atteint le sommet de la montagne, et nous avons été reçus dans le sanctuaire du Cogiour (prêtre-roi), où il profère ses oracles. Nous avons été reçus aussi par une foule d'hommes et de femmes complètement nus. Deux heures après, un des Missionnaires, qui avait une faim de loup, a demandé quelque chose à manger au prêtre-roi. Près d'une cabane, il y avait un énorme coq qui chantait à tout moment. Dix minutes après, ce coq était saisi, tué, plumé, et mis sur le feu sans sel ni autre condiment, ils nous l'ont servi, et en moins de dix minutes, arrosé avec de l'eau, il était déjà digéré.

J'embrasse Votre Pourpre Sacrée, et je me déclare


votre dévoué et obéissant fils

+ Daniel Evêque

et Vicaire Apostolique


1097
Père Giuseppe Sembianti
0
El-Obeid
30. 07. 1881

N° 1097; (1051) - AU PERE GIUSEPPE SEMBIANTI

ACR, A, c. 15/129

N° 30

El-Obeïd, le 30 juillet 1881

Mon cher Père,

[6920]

J'ai oublié de vous répondre au sujet de la Vicaire des anciennes Soeurs dont les vœux arrivent à échéance. D'après ce que m'a dit Mère Teresa Grigolini à Vérone et de ce que j'ai pu voir, il ne faut pas lui permettre de renouveler ses vœux, mais il faut plutôt la laisser partir chez elle, parce qu'elle n'a pas d'esprit, et qu'elle ne fait que gêner la Mère et troubler la paix de l'Institut.

Je ne la voudrais pas en Afrique, même si elle était couverte d'or ; et si elle ne s'adapte pas aux plus âgées, ou si la Mère ou vous, pensez qu'elle n'a pas sa place en tant que Vicaire des plus âgées, qu'elle soit renvoyée.

Compte tenu de l'insuffisance des pluies au Cordofan, on peut prévoir pour l'année prochaine une terrible disette. Mon Dieu ! Que de souffrances ! Mais "sa miséricorde est une aide au dessus de tout" (misericordia eius super omnia opera sua ).


[6921]

Je me hâte de partir d'ici ce soir pour Khartoum, où d'importantes affaires concernant l'esclavage m'attendent. La Mission aura beaucoup de mérite devant Dieu et l'humanité. A présent, surtout, il y aura la certitude des avantages dont profitera la Foi, parce que ces peuples sont convaincus que leur libération de l'horrible traite des esclaves, qui les a presque tous décimés, est l'œuvre de l'Eglise Catholique. Je me hâte car je pars avec l'Abbé Fraccaro pour le sauver.

Ici il est toujours malade, et il risque d'y laisser sa peau. Je suis sûr qu'avec deux mois de repos et d'exercices, il ira mieux, et pourra regagner son poste.


[6922]

J'amène avec moi à Khartoum l'Abbé Vincenzo Marzano, parce que son vieux père, malade depuis 4 ans, a insisté aussi auprès de Propaganda Fide pour voir son fils une dernière fois.

En outre, l'Abbé Vincenzo mérite un peu de repos ; il se contente seulement de deux mois de congé chez lui, puis il revient en novembre dans le Vicariat.

Je préfère qu'il parte maintenant plutôt qu'au mois de mars, parce qu'ici c'est la période des maladies ; et il m'est plus utile en janvier car, sans avoir une épine dans le cœur, je peux compter sur lui pendant de nombreuses années. Il est bon, il a le sens de l'abnégation, il est habitué au climat, et il est estimé et aimé de tous.

Sœur Teresa Grigolini m'en fait de grands éloges. Il ira à Vérone en automne pour passer quelques semaines avec vous. Comme il m'a accompagné lors de l'exploration dans la région natale de Bachit, faites venir Bachit à l'Institut.


[6923]

Comme l'Abbé Vincenzo est un protégé du très célèbre et très cultivé Monseigneur Salzano Archevêque d'Edessa, Représentant de Pie IX en 1860 pendant l'exil des Evêques, mais aussi Théologien, Historien Canoniste..., lequel m'a écrit hier de Naples au sujet de l'Abbé Vincenzo, je vous envoie la lettre de ce célèbre Archevêque, avec lequel j'ai prêché en français sur la montagne de Notre Dame de la Salette en juillet 1868.

Cet évêque a répondu il y a un mois à l'ex-Père Curci à propos de la dernière bêtise du journal la Nuova Italia, il a écrit une magnifique lettre dans laquelle il dit : "Autrefois, il fallait freiner les jeunes ; maintenant, il faut retenir les brides des plus âgés..." C'est un des plus doctes et des plus saints Evêques de la Catholicité.


[6924]

Il y a dix jours, j'ai reçu votre lettre N° 30 des 10 et 11 juin, et elle m'a rempli d'affliction. Elle est pleine de soupçons, d'accusations contre moi, tout cela est bien loin de la vérité, et n'existe que dans votre tête.

Que la volonté de Dieu soit faite. Je ne réponds pas maintenant, parce que je suis épuisé et découragé ; il vaut mieux que j'attende un moment de calme et de tranquillité. Jésus qui est mort sur la Croix m'aidera à porter toutes les miennes.

Je vous bénis ainsi que les Instituts.

+ Daniel Evêque


1098
Directeur Museo Missioni Catt.
0
?. 07. 1881

N° 1098; (1052) - AU DIRECTEUR DE LA REVUE  "MUSEO DELLE MISSIONI CATTOLICHE"

" Museo delle Missioni Cattoliche" (14/8/1881)

Juillet 1881

Extrait d'une lettre.

1099
Carte des Monts Nouba
0
?. 07. 1881

N° 1099; (1053) - CARTE DES MONTS NOUBA

ACR, Sez. Carte Geografiche

Juillet ? 1881

Inscription qui accompagne la Carte Géographique du Dar Nouba.

1100
Pellegrino Matteucci
0
El-Obeid
?.07.1881

N° 1100; (1054) - A PELLEGRINO MATTEUCCI

"Museo delle Missioni Cattoliche" XXIV (1881), p. 720

El-Obeïd, Juillet ? 1881

(Khartoum, le 3 août 1881)

Mon cher Docteur,

[6925]

De retour d'une importante mission dans les montagnes du Dar Nouba, je reçois la bonne nouvelle de votre mémorable voyage le long du Nil en Nubie à travers le Darfour, Waday, Bornou, etc. jusqu'à la côte de Guinée, avec le valeureux Massari.

Cette nouvelle a rempli mon cœur de joie parce qu'elle efface toute trace d'échec, si c'était le cas, de vos deux précédents voyages, qui ont cependant été des voyages importants. Je suis content parce que votre succès actuel répare tous les échecs des autres expéditions, et parce que le voyage que vous avez fait avec Massari est mémorable et nouveau par rapport à celui de Nachtigal et à ceux d'autres célèbres voyageurs en terre africaine.


[6926]

Recevez donc mes sincères félicitations car vous les méritez, tout comme vous méritez aussi les remerciements de la science géographique.

Je n'ai le temps que de vous adresser mes salutations pleines d'affection, et je me déclare être pour toujours

votre affectionné ami

+ Daniel Comboni

N.B. : La date du 3 août 1881 apparaît dans la Revue.

[Mgr. Comboni ne pouvait pas être à Khartoum le 3 août, mais il était en voyage entre El-Obeïd et Khartoum. Il est parti d'El-Obeïd le 30 juillet, et il est arrivé à Khartoum le 9 août. Cf. Grancelli..., p. 399].