Gabriele dans sa jeunesse, ayant pris le diplôme d'enseignant, était actif dans le groupe des Jeunes de l'Action Catholique et comme catéchiste paroissial. Pendant la guerre, il fut appelé au service militaire. A la fin de la guerre et dans les jours confus qui suivirent le 25 avril 1945, Gabriele, pour ne pas tomber dans le réseau de la petite République que les fascistes cherchaient à former, abandonna l’armée et, n'ayant pas d'argent pour payer son billet, il traversa de nuit le fleuve Adige et rejoignit sa maison.
A cette époque-là, le P. Pietro Villa visitait les paroisses en recherche de vocations adultes. Gabriele en-tendit l'appel du Seigneur. On lui demanda d'enseigner les mathématiques à Trento, dans notre Ecole Apos-tolique de Muralta. Il fit son noviciat à Gozzano (1953-1955) et sa théologie à Venegono (1955-1959). En-suite il fut envoyé à Pellegrina pour enseigner toujours les mathématiques aux Frères.
En 1960, il partit pour le Brésil. A Balsas, il fut secrétaire de l'évêque, administrateur de la prélature, res-ponsable des Frères, recteur du séminaire: à cette tâche, il faut ajouter son ministère pastoral. Ponctuel à ses pratiques de piété, il était toujours disponible pour des célébrations particulières, comme celles pour les différents groupes d'étudiants et de fin d'année scolaire. Il aimait célébrer pour les malades et les personnes âgées. Voici les différentes missions dans lesquelles il a travaillé: Alto Parnaíba, São Raimundo das Manga-beiras, Açailândia, Timon (São Antonio). Pendant un certain temps, il fut également au Portugal comme for-mateur dans la maison de Coimbra. Timide, intelligent, simple et spirituel, il parlait bien et avec une grande simplicité. Les gens l'aimaient beaucoup.
Il avait une mémoire phénoménale. Il se rappelait même du nom des personnes rencontrées bien des an-nées auparavant, même si rarement il leur rendait visite par peur d'être trop ému.
Toujours prêt à obéir, il ne se lamentait jamais quand il était transféré. Il s'y connaissait en beaucoup de choses: travail matériel, constructions, automobiles, électronique... Il se sentait heureux et il aimait rendre les autres heureux avec ses plaisanteries et ses histoires drôles. Il n'a jamais perdu sa passion d'enseignant et de catéchiste qu'il avait depuis son adolescence avec les Jeunes de l' Action Catholique.
Ayant grandi selon les paramètres de l'Eglise Tridentine et ayant expérimenté dans sa jeunesse les “luttes” de l’Action Catholique contre le fascisme, il avait un grand amour pour l'Eglise et il voulait qu'elle fût parfaite. Il n'acceptait pas les critiques sur la hiérarchie. Il souffrait beaucoup quand il entendait quelques confrères qui voulaient quitter le sacerdoce ou l’Institut. Pour lui, la fidélité aux engagements assumés était une res-ponsabilité aussi grande que celle de ne pas admettre des faiblesses ou des défections.
Il aimait bien ses confrères et il faisait tout son possible pour qu'ils se trouvent bien quand ils venaient le voir. Qui d'entre eux n'avait pas goûté les “macaronis” que Gabriele préparait avec tant de soin? Il ne sup-portait que l'on parle mal d'un confrère. Il était toujours prêt à dédramatiser avec quelques mots, comme cette fois où à la fin d'une vive discussion sur la théologie de la libération, il s'exclama: “Je veux mourir es-clave!”. Ce fut comme une douche froide et personne ne dit plus rien!
Il passa ses dernières années à Timon (São Antonio) en communauté avec les postulants. L'un d'entre eux écrivit: “Le P. Gabriele a été un exemple d’acceptation et de témoignage du Royaume. Il a aidé beau-coup d'entre nous, postulants, dans l'appel radical au charisme et à la mission de Saint Daniel Comboni. Le P. Gabriele nous a encouragés par une expérience missionnaire et une sagesse propre aux grands hom-mes. Nous avons remarqué en lui spécialement trois aspects. Le premier, la valeur de la communauté. Comme supérieur de la maison de formation, il montrait une préoccupation spéciale pour que tous se sen-tent bien. Les moments communautaires, comme les repas et les célébrations spéciales, étaient des occa-sions de vraie joie et de bonheur. Le second, la prière personnelle et communautaire. C'était presque tou-jours lui qui présidait la prière communautaire et il nous disait que l'amour et le zèle pour la prière avaient été chez lui les deux piliers de sa vocation missionnaire. Tous les matins, bien avant d'aller à la chapelle, on voyait de la lumière dans sa chambre et l'on entendait une voix toute basse qui murmurait: c'était lui qui priait.
Le troisième, l’amour et la confiance dans le Seigneur. Il nous enthousiasmait avec son amour profond et sa confiance totale en le Seigneur. Parfois, il nous révélait quelque fait intéressant de sa vie privée. Comme par exemple, quand, dans sa première visite aux communautés des régions rurales de Balsas, tout seul, à cheval, sous un soleil brûlant, la langue et la gorge sèches, il commença à penser: ‘Qu'est-ce que je suis en train de faire ici, loin des miens et de mon pays? J’ai eu envie de pleurer... Aussi, à un certain mo-ment, des larmes abondantes me baignèrent les lèvres et la langue. Mais, à de tels moments, j'ai senti éga-lement que le Seigneur était avec moi. Cette confiance en sa Présence, m'a, par la suite, accompagné pen-dant toute ma vie’”.
Dernièrement, le P. Gabriele avait été transféré à São Luís, surtout pour ne pas peser sur la communauté de Timon. A l'hôpital, on découvrit que son foie était très atteint. Alors, il partit pour Vérone avec l'espoir d'être opéré et de pouvoir revenir ensuite. Il voulait absolument mourir au Brésil. Nous avons suivi par Inter-net l’évolution de sa maladie. A l’aube du 9 juillet, nous avons reçu la nouvelle que sa course sur terre était achevée. Dans la communauté où nous avons célébré la Ste. Messe de suffrage, beaucoup de gens pleu-raient, se rappelant du P. Gabriele comme quelqu'un de bon, estimé et aimé.
Ce fut bon de vivre avec lui, toujours heureux d'être le “serviteur fidèle de Notre Seigneur Jésus Christ”, tel qu'il aimait se présenter en paraphrasant son propre nom “Gabriele”. Et c'est ainsi qu'il a toujours vécu: comme un frère humble et heureux, un homme de Dieu et des pauvres. Parmi les témoignages que le P. Gabriele nous a laissé, nous avons compris qu'il s'est donné sans réserve au Seigneur et à la mission, comme Saint Daniel Comboni.
(P. Candido Poli)